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L’ultime secret d’une bonne annonce : les valeurs

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Réfléchir à l’annonce est une discipline nouvelle pour moi. Mais, pour une raison que j’ignore, 2016 semble être l’année où l’on nous demande des formations sur l’annonce. Du coup, je voulais partager avec vous ce qui était ressorti de tous ces échanges, dans une série d’articles.

Commençons par le commencement. Je pense avoir découvert le secret d’une bonne annonce : l’écrire. Vraiment. Je sais : c’est décevant comme secret. Mais dans 95% des cas que j’ai observé, le seul problème de l’annonce c’était qu’elle n’avait pas été écrite par le recruteur. Il s’agit alors d’un copié-collé entrepris avec plus ou moins de succès. Et on se retrouve avec quelque chose de totalement indigeste à lire.

Mais comme je ne vais pas vous faire un article qui tient en un seul mot, parlons d’un deuxième secret : les valeurs de l’entreprise.

Commencer par le pourquoi

J’étais très sérieux sur le premier secret. Si vous n’êtes pas fermement décidé(e) à écrire vos annonces, rien de ce qui va suivre ne sera utile. C’est tout sauf une plaisanterie.

Dans une vidéo qui commence à être très connue, Simon Sinek explique qu’un message attractif doit partir du « pourquoi » pour aller vers le « comment » puis le « quoi ». Le problème c’est qu’intuitivement on fait l’inverse : on commence par le « quoi », puis on décrit le « comment » et on zappe le « pourquoi ».

Il explique alors que si Apple communiquait comme la plupart des gens voici à quoi ressembleraient leurs messages :

« Nous faisons d’excellents ordinateurs. Nous faisons en sorte qu’ils soient simples à utiliser et beaux à regarder. Vous voulez en acheter un ? »

Voici comment Apple communique vraiment :

« Tout ce que nous faisons, nous le faisons parce que nous croyons dans le renversement du statu quo. Nous croyons qu’il faut penser différemment. Comment menons-nous cette mission ? En faisant en sorte que nos produits soient simples à utiliser et beaux à regarder. Et il se trouve que l’on fait des ordinateurs. Vous voulez en acheter un ? »

Le deuxième message est plus percutant, plus inspirant, plus fidèle parce qu’il commence par le « pourquoi » au lieu de commencer par le « quoi ». Personne n’a jamais été inspiré par un « quoi ».

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Pourquoi je vous parle de ça ? Parce que le « pourquoi » dans notre cas c’est notre culture, l’ensemble de nos valeurs. Et le « quoi » c’est la liste des compétences que l’on recherche. Personne n’a jamais été inspiré par une liste de compétences.

Avant d’écrire la moindre annonce il faut donc connaître les valeurs de l’entreprise. Plus facile à dire qu’à faire, je sais. Mais sans ça il est impossible de faire une annonce qui se ditingue des autres.

Comment distinguer les vraies valeurs des fausses valeurs ?

Le plus grand obstacle c’est que les valeurs sont quelque chose d’implicite et de difficilement observable quand on fait soi-même partie de la culture en question. « L’oeil ne peut pas se regarder lui-même ».

Et, malheureusement, dans beaucoup d’entreprises, les valeurs officielles contiennent une majorité de fausse valeur. Tout simplement parce qu’une valeur ça ne se décrète pas, ça se vit et ça se cultive. Du coup, par prudence, beaucoup de services marketing proposent des valeurs consensuelles pour ne fâcher personne et ne pas se tromper. Le souci c’est qu’une valeur trop consensuelle est creuse.

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Par exemple, tout le monde sent bien que « l’humain », « le respect », « l’honnêteté » sont des choses creuses.

Je regarde tellement de vidéos d’Oussama Ammar que je ne sais plus dans laquelle il donne cette astuce mais c’est la meilleure que je connaisse pour distinguer les valeurs creuses des vraies. Et cette astuce c’est : « une vraie valeur c’est quelque chose dont l’opposé peut lui-même être une valeur. Quand vous inversez une vraie valeur ça donne une autre valeur ».

Si on revient à nos exemples précédents, l’opposé du « respect » n’est pas une valeur. En effet, personne ne peut clamer que sa valeur c’est « l’irrespect ». De même, l’opposé de l’honnêteté n’est pas une valeur. Personne ne se proclame malhonnête. De même, « être inhumain » n’est pas une valeur.

Si quelque chose fait consensus ça ne peut pas être votre valeur à vous. Si une valeur est totalement consensuelle c’est forcément du vent. Vous vous rappelez d’Enron ? L’entreprise qui a fait faillite à cause de ses énormes tricheries comptables ? Et bien leurs valeurs affichées étaient : La communication, le respect, l’intégrité, l’excellence.

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D’ailleurs, 55% des 100 plus grandes entreprises américaines affichent l’intégrité comme valeur (source : Harvard Business Review ).

À quoi ressemble une vraie valeur ? C’est une croyance profonde qui est partagée par les membres de l’entreprise. Par exemple, une de nos valeurs est la transmission du savoir au plus grand nombre. L’opposé serait : « le savoir doit être détenu par une élite et/ou gardé pour soi». Et ce serait encore une valeur.

À un moment, une des valeurs de Facebook était : « Move fast and break things ». L’idée c’est qu’on ne peut pas innover rapidement sans casser des pots. Là encore, l’opposé fonctionne : « Soyez prudents et construisez sur des fondations solides ». D’ailleurs, je préfère que ma banque se revendique de la prudence plutôt que de la vitesse.

Je pense que vous commencez à comprendre le concept. Essayez avec ce que vous pensez être vos valeurs. Allez sur votre site corporate ou dans le guide des valeurs et tentez d’inverser chacune des valeurs pour voir si elle est concrète ou pas.

Une bonne annonce transmet vos valeurs

Malheureusement, beaucoup d’annonces sont rédigées comme on ferait une liste de courses au supermarché. C’est-à-dire en faisant une liste interminable de compétences et de pré-requis.

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Or, une annonce ne peut pas être une fiche de poste. Nous avons pris l’horrible habitude de confondre annonce et fiche de poste. La fiche de poste est quelque chose de contractuel dont le but est de définir un périmiètre d’action. On ne lui demande pas d’être lisible ou captivante. Du coup, quand on copie une fiche de poste et qu’on en fait une annonce on arrive sur le pire résultat possible.

En effet, il n’y a pas de valeurs dans une fiche de poste (on en revient au problème de partir du « quoi » plutôt que du « pourquoi »). Et, pire encore, toutes les fiches de postes sont sensiblement les mêmes, pour un poste donné.

Je viens de taper « controleur de gestion annonce » et j’ai été sur la première annonce que Google m’a renvoyé (pour ne pas qu’on m’accuse d’avoir choisi volontairement la pire annonce). Voici un extrait de l’annonce :

« Vous déployez les outils nécessaires à l’analyse des performances de la filiale étrangère de l’entreprise et établissez les prévisions d’activité en matière d’objectifs de production, de budget, d’organisation et de moyens en collaboration avec les équipes opérationnelles sur place. Aussi, vous déterminez et suivez les coûts de production (flux matières, main d’œuvre, consommables, énergies…) et les prix de revient. »

Oui…en gros je vais être contrôleur de gestion quoi.

Mettre une partie de la fiche de poste n’est pas un problème en soi. Le problème c’est que la quasi-intégralité de l’annonce est une fiche de poste :

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Car cela veut dire que je n’apporte rien de concret à un candidat qui lit l’annonce. Puisque tout le monde copie à peu près la même fiche de poste, il devient impossible de différencier une entreprise d’une autre, sur la base de son annonce.

Si vous copiez-collez les annonces, vous aurez des candidatures copiées-collées. Il n’y a pas de miracle. Une annonce qui part de vos valeurs et qui les retranscrit, sera forcément unique. Sans compter que ça impliquera forcément de parler du candidat non plus uniquement en termes de compétences mais également en termes de valeurs, justement. L’éternel équilibre savoir-faire/savoir-être.

C’est pour cela qu’un des plus grands pièges dans lequel on tombe c’est de vouloir copier une annonce fun ou « décalée ». Sous aucun prétexte il ne faut copier l’annonce de quelqu’un d’autre ! Surtout si vous n’êtes pas fun vous-même. L’important ce n’est pas que l’annonce soit fun, c’est qu’elle soit en accord avec la culture de l’entreprise en question.

Déjà, si vous utilisez le mot « décalée » pour parler d’une annonce c’est mauvais signe, ne la copiez surtout pas.

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Car, en général, l’utilisation de ce mot est propre à des cultures très rigides et conformistes. Je suis à chaque fois surpris quand un recruteur utilise ce mot quand je lui montre une annonce. Parce que ça sous-entend qu’il y aurait un ton et une manière uniforme de faire des annonces.

D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi, quand j’aborde ce sujet, beaucoup de gens se focalisent sur le « fun » ou le tutoiement/vouvoiement . Ce sont des points totalement secondaires (voire tertiaires) comparé à la nécessité d’écrire une annonce qui parte des valeurs.

Conclusion

Une bonne annonce est une annonce qui a été écrite. Et pour écrire une annonce il faut partir de ses valeurs, sa mission, tout ce qui explique pourquoi on fait les choses et qui nous différencie des concurrents.

Sinon, cela donne une de ces innombrables annonces qui se ressemblent toutes les unes les autres, comme dans un cauchemar orwellien moderne.

La prochaine fois, on rentrera dans des choses plus concrètes sur notamment la structuration de l’annonce ou les grands principes d’écriture. Et pour les abonné(e)s à LEDR Pro qui serait impatient(e)s, n’oubliez pas que nous vous avons déjà préparé un module entier sur le sujet.

TruAcademy-Annonce

D’ici là je vous souhaite un bon sourcing :D.

PS : Voici la première annonce que Laurent a publié. Elle est loin d’être parfaite et énormément de choses sont à redire. Il y a notamment un problème sur le traitement du féminin. MAIS au-delà des imprécisions, on sent la singularité de l’entreprise se dégager : hhttps://lecoledurecrutement.fr/on-cherche-un-superman-vendeur-chez-link-humans/

Les commentaires

  1. Excellent. On pourrait partir de cet article pour expliquer pas mal de problèmes vécus par les recruteurs. Souvent, quand le recruteur ne trouve pas les candidats, c’est parce que le job et/ou la boîte ont un souci en terme d’attractivité. Quand tu es face au business, tu n’as que deux options à leur proposer: soit ils baissent leurs attentes, soit ils font un gros travail de fond quand à l’entreprise. Ce message est très dur à faire passer car un manager a rarement envie d’entendre que le job qu’il propose n’est pas sexy ou que son entreprise n’a pas une bonne image sur le marché. On demande alors au recruteur d’être « créatif » et d’apporter des solutions. Eminemment compliqué quand on refuse de s’attaquer au coeur du problème…

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